Jean Yanne
A rebrousse-poil
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Description de l'ouvrage :
Qui n'est pas attendri au souvenir de Jean Yanne ? de ses yeux de cocker, de sa voix pleine de gouaille ? de ses sketchs, de ses films ou de ses multiples emplois de Français moyen, râleur, vachard et égoïste ? Et qui, aujourd'hui, l'a remplacé ? Enfant des banlieues ouvrières, Jean Yanne traitait avec un égal mépris les bourgeois arrogants et les révolutionnaires en chambre. Au cinéma, à la télévision, à la radio, au cabaret, en chanson et même en bande dessinée, ce touche-à-tout génial traquait sans répit les ridicules de son temps. Sans autre boussole que sa haine des cons et des snobs, il incarnait des types bourrus au cœur d'or comme les crapules les plus ignobles, jouant aussi bien chez Chabrol, Godard et Pialat que dans des comédies populaires ou des téléfilms à succès. Indomptable, Jean Yanne fut également vilipendé plus souvent qu'à son tour. On le traita d'anarchiste, de démagogue ou d'affreux réac. De contradictions, il ne manquait certes pas : faux dur, clown triste, bourreau de travail nonchalant... Ce livre retrace le parcours personnel et artistique de ce personnage haut en couleur et ô combien attachant à travers une enquête méticuleuse et de nombreux témoignages, critiques et articles de presse de l'époque. On y découvre un homme qui, à l'instar de beaucoup de comiques, cachait sous des dehors d'ours mal léché une tendresse immense. Et qui, en disparaissant il y a une dizaine d'années, nous a laissés orphelins de son talent unique et de sa liberté insolente. Bertrand Dicale explore les cultures populaires depuis une vingtaine d'années dans la presse, à la radio et à la télévision. Il est l'auteur de nombreuses biographies à succès consacrées à Juliette Gréco, Serge Gainsbourg, Louis de Funès, Georges Brassens...
Revue de Presse :
Dans son dernier livre d'aphorismes, J'me marre, Jean Yanne écrivait : «Je n'ai pas le sens de l'humour, j'ai le sens du ridicule.» Et peu de gens, peu de choses, échappent au ridicule, croqués par cette grande gueule de Parigot frondeur dans des sketches radiophoniques ou dans des films à grand spectacle socio-délirants. Alors que 2013 va marquer le dixième anniversaire de sa mort, Bertrand Dicale le fait revivre dans une minutieuse biographie, Jean Yanne, à rebrousse-poil... Si Jean Yanne acteur prend une gravité et une épaisseur humaine qui révèlent une autre face de sa personnalité, plus tendre et plus triste, Jean Yanne réalisateur retrouve la verve satirique hénaurme de l'homme de radio et de télévision. «Comme tous les sceptiques, il voit surtout, dans une révolution, ce qu'elle ne change pas, observe Dicale à propos de son deuxième film, Moi y'en a vouloir des sous. Il contemple, goguenard, les complicités qui unissent tous les acteurs des conflits sociaux. Patronat, syndicats, organisations gauchistes (...) lui paraissent être de connivence - sinon le monde changerait vraiment.» L'argent cimente tout ; les choses ont-elles vraiment changé ? (Marie-Noëlle Tranchant - Le Figaro du 13 décembre 2012)
Extrait :
Extrait de l'avant-propos
Nîmes, 1958. Aux arènes antiques, un jeune homme au visage poupin est assis au centre de la scène, derrière un guide-chant nasillard, un minuscule harmonium électrique comme on en entend le dimanche dans les petites paroisses catholiques ou dans les répétitions des chorales. Il a annoncé, en commençant son tour de chant : «Je voudrais réconcilier le clergé et la classe ouvrière.» On s'est regardé avec des yeux ronds, on a haussé les épaules. Quelques-uns ont éclaté de rire. Quelques-uns.
Il n'est pas la vedette de la soirée et il passe en «anglaise», avec une demi-douzaine de chansons en fin de première partie du spectacle. La vraie vedette, la seule dont la photo paraît sur les affiches, est Dalida. Ce genre de soirée est une loterie pour les artistes qui n'ont pas la chance d'avoir ce statut : soit le public manifeste chichement son plaisir, soit il manifeste son indifférence. Donc, on n'applaudit pas beaucoup ce jeune homme.
Et on sent même une sorte d'électricité. Dans la salle, des pieds raclent le sol, des murmures réprobateurs se font entendre. Il attaque d'un ton morne une chanson dont il annonce qu'elle s'appelle Le Mambo du légionnaire :
«Sur un piano systématiquement faux
Un légionnaire énigmatiquement beau
Jouait, jouait pour oublier ses tourments
La toccata qu'il aimait tant.»
En ce temps-là, en Algérie, des unités de la Légion se battent, d'autres sont parties à la conquête des cœurs - la guerre coloniale, en somme. Les légionnaires de 1958 n'ont peut-être pas énormément le sens de l'humour. Ils sont quelques dizaines dans les arènes, en uniforme de ville, chaussures noires et képi blanc immaculé. Et ils n'aiment pas la chanson de Jean Yanne.
Si on l'écoute soigneusement, il n'y a rien à redire. Pas d'outrage au drapeau, pas de propos insultant pour la Légion, pas de profession de foi antimilitariste. Mais cette chanson prend à rebrousse-poil les légionnaires venus écouter Dalida. Tout y est absurde, étroit, dérisoire, anecdotique. C'est pire qu'injurier ces «héros de Camerone et frères modèles» dont Le Boudin, l'hymne des légionnaires, dit : «Nos anciens ont su mourir/Pour la gloire de la Légion/Nous saurons bien tous périr/Suivant la tradition.»
Il ne s'agit pas de mourir, il s'agit... de rien. Une fantaisie absconse avec «un souple tanagra», des moustiques, des chameliers, et ce légionnaire au piano. À la fin de la chanson, Jean Yanne annonce : «Gag désopilant.» Sur l'air d'Ah ça ira, ça ira, il chante :
«Au Sahara, Sahara, Sahara
Tant que les mousmés et les légionnaires
Au Sahara, Sahara, Sahara
Pourront faire des fugues et des toccatas.»
Voir le site internet de l'éditeur First éditions
Voir la filmographie complète de Jean Yanne sur le site IMDB ...
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Nota : Un livre sur fond légèrement grisé est un livre qui n'est plus actuellement édité ou qui peut être difficile à trouver en librairie. Le prix mentionné est celui de l'ouvrage à sa sortie, le prix sur le marché de l'occasion peut être très différent.