La Destruction de la France au cinéma
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Description de l'ouvrage :
Ce livre commente la destruction – ou la disparition de la France – de 1945 aux années 70. Je considère que si la France est devenue ce que l’on sait depuis, elle était déjà finie alors, dans les années 70. Je l’ai perçue ainsi enfant déjà quand j’y venais, sorti de ma tranquille Tunisie. Je suis arrivé à Brest en famille en 1972, ville entièrement détruite et reconstruite, artificielle au possible. Cela ne parlait que football et télé à l’école et j’avais déjà le caractère des trois emmerdeurs des Vieux de la Vieille. Mon seul réconfort visuel : les classiques US à la télé encore bien doublés et Chapeau melon et bottes de cuir – Emma Peel et Tara King.
Ce qui restait de la France c’était des bribes : le petit village, la petite campagne vite captée par le tourisme industriel avant de servir d’investissement immobilier au bourgeois écolo – on ne disait pas encore bobo. Le reste était promis à plus d’industrialisation, plus de destruction, plus de recyclage. On avait une émission très bonne qui s’appelait : la France défigurée (Péricard et Bériot) le samedi je crois après manger.
Le remplacement m’est apparu dès cette époque : on se foutait de l’histoire, de la littérature ; on aimait la baise, le tourisme, la gesticulation motorisée ; on aimait la ville nouvelle, la bouffe nouvelle, et la spéculation. Et on est passé de mille balles du mètre à dix mille euros en cinquante ans, et à peu près partout. On s’adapte, comme dit Céline.
Le cinéma même mauvais a filmé cela : il est la vérité vingt-quatre fois par seconde quand la télé est le mensonge vingt-quatre fois par seconde – conditionnement pour accepter tout ça et pour la fermer. J’ai vu par le cinéma la France remplacée dans Play Time de Tati, j’ai vu la France cybernétique et totalitaire dans Alphaville, et j’ai vu comme Rimbaud les effets sur les populations : les valseuses. J’ai vu la fin des ânes dans Balthazar.
J’ai vu disparaître ce qui restait d’Ancien Régime : le marquis libertin de la Femme du boulanger, les paysans traditionnels de Farrebique, les chevaliers servants de l’Empire dans Alerte au Sud (admirable et méconnu film de Devaivre). J’ai vu disparaitre les curés aussi : c’est l’athée Jean Renoir qui filme un chant du cygne antimoderne dans le Déjeuner sur l’herbe. Son curé y est prodigieux et y annonce comme ceux de Pagnol la grande catastrophe. Mais les idiots avancent toujours, les somnambules, dit Hermann Broch.
A la place est apparue une société froide et structurée autour de nouveaux axiomes : le capitalisme, l’Etat-providence, le court terme, le sexe, la violence fantasmée, la sottise télé. Tout cela a suscité au début des résistances (merci à Guy Debord qui m’aura éclairé pour tout) et puis on s’est habitué. Va critiquer la télé maintenant, va… Va remettre en cause l’usage hypnotique de la technologie, va… C’est Fahrenheit 451 partout (marrant tout de même ce film de Truffaut tourné en anglais et pas en français).
Bonne chance aux lucides.
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