Riffs pour Melville
Sous la direction de Jacques Déniel et Pierre Gabaston
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Description de l'ouvrage :
Une rétrospective Jean-Pierre Melville au cinéma Jean-Vigo de Gennevilliers, en 2008, décide de ce livre qui convainc sur-le-champ tous les auteurs, rassemblés ici, à venir avancer leur improvisation. Détacher leurs notes bruissées ou frappées. Phrases thématiques ou impromptues affichent leur goût de Melville. L'affirment. Des riffs, donc une qualité d'exécution. Chemins de l'aléatoire et de la rêverie que ce projet éditorial. Pour voir ! Pour mieux dégager l'inclination que chacun porte à cette œuvre qui court de 1947 à 1973.Treize films. Un nombre. Celui du recommencement d'un auteur porté à reprendre et moduler ses inspirations créatrices. Riffs pour surprendre - braver - le jaillissement d'une révélation méconnue jusqu'alors et qui force l'appareil critique habituel réservé à l'auteur du Deuxième Souffle. Voie pour activer nos recherches ; raviver l'imagination du lecteur. Notre prise de risques. Melville exigeait pareil appel. Manouche, Jeanne, Mathilde, ses grandes dévouées magnétiques, fourvoyées, perdues, n'en attendaient pas moins. Et Faugel, Costello, Corey ? Eux aussi, non ? Pour eux tous, épousons les fugues de la pensée imaginante. Ou notre envie d'écrire sur Melville. Riffs pour Melville délaisse un peu le lustre de truands qui écourtent leur sort dramatique sous l'influence d'une déréliction ; leur culte, leur passion. Aujourd'hui ils reviennent sur les écrans aussi étranges que les Inuits de Flaherty. Comment se (re)constitue, s'organise le besoin cinématographique de leur garant créateur ? S'y dégage mieux sa sphère de rêverie et de pensée ? Sa vision, sait-on jamais, excède le dosage méticuleux de l'ombre portée d'un chapeau sur le front d'un affranchi. Melville sort d'un dilemme terrible de l'Histoire : résistance ou barbarie. Sa caméra escorte l'homme ; appréhendé entre ombre et miroir ; comprimé entre hasard subjectif et objectif destin ; assiégé entre lui et lui-même (l'autre lui-même). Or il circule, s'expose. TEXTES Pierre Gabaston. Alors Melville ? + Manière(s) de Melville / Marcos Uzal. Trop tard, trop tard / Fabrice Revault. Hard and Soft. À l'os et feutré / Alain Keit. Le cercle bouge / Olivier Bohler. Papillon de nuit, ailes brûlées / Jacques Déniel. Deux âmes à l'épreuve / Frédéric Sabouraud. Le cinéma comme crime parfait / Bernard Benoliel. La guerre continuée / Jean-BaptisteThoret. Poétique de la télépathie / Serge Toubiana. Le cercle du temps / Jean-François Rauger. Un jeu fatal / Pierre Marie Déniel. Temps réel/Vision du réel + Le formel, le récit, l'émotion / Pierre Laudijois. L'ellipse contre le temps réel / Gilles Mouëllic. La sérénité tragique du jazz / Jean-Marie Samocki. Melville paysagiste + La trahison ou le fantôme de la moralité / Jacques Mandelbaum. De Grumbach à Melville. L'hypothèque juive / Alain Bergala. De l'acteur, point nodal du cinéma melvillien. ENTRETIENS «Il te guette, il te regarde, il t'écoute.» Conversation avec Paul Crauchet par Alain Keit / «Il aurait voulu qu'il ne se passe rien.» Conversation avec Alain Corneau par Jean-Baptiste Thoret / Rui Nogueira parle de Melville. Propos recueillis par Pierre Gabaston / Jean Douchet parcourt le Cercle rouge. Propos recueillis par Pierre Gabaston.
Extrait :
ALORS MELVILLE ?
Extrait de l'introduction de Pierre Gabaston
Avec ces riffs, ma foi, improvisés ou préparés, adjoints, annexés, pour exhausser le plaisir perçant de ses rythmes de montreur d'ombres. Accords en coup de sonde. Mesures d'un coup de foudre. Qui n'accourt pas, ici, «faire un bœuf» à l'auteur du Cercle rouge ? Le premier coup de cymbale est-il donné ! Avec Bresson, Cocteau et Resnais, un des quatre parrains de la Nouvelle Vague. Possédant ses studios. Grillant, le premier, l'octroi retors en forme d'épreuve absurde : votre carte syndicale, voulez-vous ? Il faut nous la présenter pour faire du cinéma. Comment l'obtenir ? Filmez d'abord. Vous débutez ? Impossible de l'empocher dans ces conditions. Le résistant fait de la contrebande. Et, la rage au cœur, tourne un film anticinématographique qui s'abreuve à un récit de Vercors où, quand Melville le lut, l'eau était plus claire. En 1943. Simultanéité : alors sur les bords de la Loire, Ponge écrit la Rage de l'expression. Arracher les mots à leur usage falsifié s'avère une tâche sans délai. Par le silence ou par le Littré. Il est minuit dans le siècle. Il sera dix heures du soir quand, le 11 août 1947, Melville commence le tournage du Silence de la mer'. Heure du cinéma de qualité française. Mais Falbalas, les Dames du bois de Boulogne, la Belle et la Bête, Sierra de Teruel, Farrebique, Au pays des mages noirs... s'évadent des portes de la nuit. Melville ouvre une brèche. De très jeunes bientôt Turcs l'observent. Choix délibéré, il tourne tous ses plans en décor naturel ; avec des acteurs professionnels. C'est inhabituel et même inédit. Le tournage s'interrompt, reprend quand le cinéaste réunit la somme d'argent nécessaire. Dix-neuf types de pellicules utilisés. Decaë photographie sans cellule. Jamais de rushes. Allongé sur un lit, Melville examine à l'œil nu ses photogrammes. Il ébauche sa mythologie. Il en est conscient, il ébranle les colonnes du temple. Aux Cahiers, Domarchi le voit comme un pionnier, l'initiateur de la «nouvelle vague» (irrésistible et irréversible), il le confirme «auteur de films du cinéma français». L'amateur fait mieux que les professionnels, et il a un point de vue sur le monde. Sur le plateau du Doulos, Melville confiera à Dancourt : «Ce que font les nouveaux cinéastes, je voulais le faire en 1937. Hélas ! je n'ai pu le réaliser qu'en 1947, avec le Silence de la mer. En 1937, je voulais tourner un film policier tout seul avec une caméra par séquences d'une minute, soit vingt-sept mètres de pellicule, et à cette époque c'était facile. C'était l'anarchie... Mais maintenant il y a des réglementations bien strictes à observer.» Le régime de production décide d'une expression nouvelle. Plus qu'une forme ou qu'une éthique. Armé de pellicules ultrasensibles, un commando pourfend obligations et servitudes. Franc-tireur mais pas mégalomane. Paradoxe absolu ? Le premier plan du générique du Silence de la mer exhibe le logotype de sa maison de production. Sur les huit colonnes d'un temple néo-classique viennent s'inscrire les huit lettres de son nom : M E L V I L L E. Un éclair de pellicule zèbre un ciel d'orage imminent puis se fixe sur le fronton de l'édifice : M.
Voir le site internet de l'éditeur Yellow Now
Voir la filmographie complète de Jean-Pierre Melville sur le site IMDB ...
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